Traversée de l’Eiger
11 Septembre 2022


Participants: Didier Marcel

Description :


Au réveil, et c’était pas prévu, les plâtriers sont passés. Dix centimètres de neige sont tombés dans la nuit sur le refuge Mittellegi. Avec les températures négatives annoncées toute la journée, inutile d’espérer le plombier, le soleil ne fera pas disparaître tout ça avant deux jours. On en a au moins pour quinze heures de mixte intégral, sans quitter les crampons, ni les gros gants, au lieu de la dizaine prévue. Ça va swinguer sur la patinoire !
Départ 7:00. Et dire qu’on avait retardé le réveil pour laisser aux premiers rayons du soleil le temps de sécher les prises. On regrette ce temps perdu.
En vérité, on se traîne. La moindre difficulté de l’arête nous coûte pas mal d’efforts mentaux et physiques. On ne voit pas souvent les rares spits enfouis sous la neige et les 3-4 friends qu’on porte au baudrier sont insuffisants dans de telles conditions. Les rafales de vent remontent le long de la face nord et nous explosent au visage. Température ressentie moins 10. La corde est un morceau de bois. On s’est trompés de saison.
Mais quelle ambiance ! À gauche, cinq cents mètres de verticale creusent un vide vertigineux en direction du glacier d’Eismeer, qu’on a traversé la veille. C’est la face sud, attirante et trompeuse, repeinte en une nuit aux couleurs de l’hiver, lumineuse, éclatante. À droite, du côté nord, un gouffre insondable de plus de quinze cents mètres ouvre sa gueule et souffle l’obscurité et le froid, au-dessus de Grindelwald. L’arête Mittellegi est d’une blancheur aveuglante sur fond de verts lointains. L’échine de l’Ogre.
Vers 11:00, au sommet des cordes fixes de la GrossTurm, un grimpeur de la cordée qu’on vient de rattraper fait une chute surplombante de dix mètres, heureusement sans trop de casse. On se met à trois pour l’aider à remonter. C’est fini pour eux. Les pales de l’hélico moulinent le bleu du ciel.
A 14:00 nous sommes au sommet. Les températures sont plus clémentes. Mais les aiguilles tournent et l’écart qui nous sépare de la cordée des jeunes s’est encore aggravé. Je suis triste pour Raf et Célia. Ils n’auront pas le temps de finir la course, c’est une quasi certitude. Aucune crainte en revanche, le secours alpin bernois réduit considérablement le danger d’engagement de cette course de niveau 4.
Nous décidons de ne pas les attendre plus longtemps et nous entamons la descente par la succession des rappels de l’arête sud-ouest entrecoupés de désescalade. Le col Nord est franchi à 17:00.
C’est dans ses parages que la Rega viendra dépiquer de la montagne nos jeunes camarades trois heures plus tard.
La longue ascension de la pointe sud qui nous sépare encore du glacier du Mönch est effectuée à un bon rythme, et nous atteignons le col Sud au soleil couchant. Fin des difficultés. Nous foulons enfin le glacier. Arrivée 20:40 sans frontale au refuge de Mönchjochhütte.
Good job !

DR





" L'association BUCalpin Montagne Escalade ne garantit pas l'exactitude et l'exhaustivité des indications fournies ( description d'itinéraires, description des conditions de course, commentaires des forums, conseils pratiques et médicaux,...) sur son site. Ces renseignements non contractuels ne peuvent en aucun cas engager la responsabilité de l'association BUCalpin Montagne Escalade, ni celle des auteurs des textes. "